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mars 28, 2024

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BILBoard avril 2024 – Des sables mouvants dans le paysage de l’investissement

Les sables mouvants du paysage de l’investissement se sont déplacés, dans la mesure où les grandes banques centrales sont parvenues à freiner l’inflation sans provoquer une sévère crise économique. Dans le même temps, les anticipations de baisse des taux directeurs se sont modérées, sans perturber les marchés. Ces évolutions, conjuguées aux résultats d’entreprises meilleurs que prévu et à l'enthousiasme suscité par l’IA, ont propulsé les indices boursiers internationaux (notamment le S&P 500, le Nasdaq, le Nikkei 225 (Japon), le Dax (Allemagne) et le Cac 40 (France)) vers de nouveaux sommets historiques le mois dernier. Bien que les évaluations soient plus élevées, l’élan pourrait se poursuivre à court terme. Afin de saisir un potentiel supplémentaire à la hausse, nous avons augmenté notre exposition aux actions à la mi-mars. Cependant, un tel mouvement nécessite une tolérance au risque élevée et une disposition à accepter la volatilité, et n’a donc été mis en œuvre que dans nos profils à risque élevé.

Perspectives macroéconomiques

Les dernières statistiques publiées suggèrent une bonne tenue de la conjoncture macroéconomique, ce qui a amené les économistes à revoir à la baisse leurs anticipations de récession de part et d’autre de l’Atlantique.

Aux États-Unis, la croissance devrait ralentir cette année après un quatrième trimestre vigoureux (3,2 %) et le scénario d’une absence d’atterrissage devrait se concrétiser. L’inflation sous-jacente poursuit sa décrue progressive et certains signes indiquent que le marché du travail commence à se détendre, ce qui rend une baisse des taux en juin envisageable. Les actions ont rebondi à la fin de l’année 2023, portées par les spéculations sur pas moins de six baisses de taux de la Fed cette année, et ont poursuivi sur leur lancée malgré la révision des attentes des investisseurs à seulement trois ou quatre baisses (le graphique à points de la Fed en suggère trois). Il semble qu’ils revoient leurs anticipations non pas parce que l’inflation les tracasse, mais parce qu’ils deviennent plus optimistes à l’égard de l’économie. Les bénéfices des entreprises, supérieurs aux prévisions – les sociétés du S&P 500 ont dépassé les estimations de 8 % dans l’ensemble –, accréditent cette idée.

Dans la zone euro, la croissance ne devrait pas faire des étincelles cette année. Toutefois, cela pourrait suffire à éviter une récession plus profonde, la croissance ne tombant que très brièvement en dessous de zéro, ce qui pourrait être considéré comme un atterrissage en douceur. Le marché du travail est un pilier essentiel, avec un taux de chômage qui est tombé à un niveau historiquement bas de 6,4 %. Par ailleurs, les indices PMI semblent s’être stabilisés sous l'impulsion des services et l’indice des surprises économiques en Europe est devenu positif pour la première fois depuis le mois de mai. L’Allemagne est toujours aux prises avec des problèmes structurels mais on observe des signes d’amélioration. Par exemple, l’indice IFO s’est redressé en février, les entreprises étant devenues moins pessimistes quant à leurs perspectives, et la production industrielle allemande a augmenté pour la première fois depuis neuf mois. En ce qui concerne la politique monétaire, la BCE a laissé entendre qu’elle pourrait commencer à baisser ses taux en juin. Elle attend davantage de données sur les accords salariaux, ainsi que sur la révision des prix par les entreprises, qui a normalement lieu au début de l’année civile.

Au Japon, le retour de l’inflation et l’abandon de la politique de taux d’intérêt négatifs qui s’ensuit sont en train de changer la donne. Les indicateurs macroéconomiques, plombés par la consommation, pourraient amorcer un redressement : à l’issue des négociations salariales annuelles qui se tiennent au printemps (Shuntō), les travailleurs japonais ont obtenu leur plus forte augmentation de salaire des trois dernières décennies (4 % en moyenne après une hausse de 3,6 % l’an dernier).

La situation macroéconomique en Chine reste difficile. Les investisseurs espéraient que la conférence annuelle des « deux sessions » déboucherait sur un plan de relance gouvernemental concret et ambitieux, mais cela n’a pas été le cas.

Stratégie d’investissement

L’optimisme grandissant à l’égard de l’économie mondiale et le rebond des bénéfices contribuent à la hausse des marchés actions internationaux. Les marchés gagnent en profondeur et pourraient poursuivre sur leur lancée dans l’immédiat car les investisseurs ne s’intéressent plus uniquement à une poignée de gagnants de l’IA et guettent les opportunités dans d’autres secteurs d’activité et d’autres zones géographiques que les États-Unis.

Dans la mesure où les baisses de taux qui ne sont pas rapidement suivies d’une récession ont tendance à faire grimper les marchés actions, il est judicieux de commencer à augmenter l’exposition aux actions des marchés développés lorsque l’appétit pour le risque le permet.

À cette fin, pour les clients avec un profil de risque élevé, nous avons accentué la surpondération globale des actions en :

  • Renforçant l’exposition aux États-Unis – ce marché offre une exposition sans égal aux thèmes structurels que sont l’intelligence artificielle (IA) et la numérisation. Par ailleurs, les bénéfices pourraient encore se révéler supérieurs aux attentes en 2024 sur fond de bonne tenue de l’économie, de baisse des taux et de dépréciation de l’USD.
  • Atténuant la sous-pondération des actions européennes – les valorisations sont faibles et quelques éclaircies se dessinent dans certains secteurs. Par exemple, une poignée d’entreprises du secteur du luxe se portent bien malgré la conjoncture morose en Chine et certaines entreprises détiennent un quasi-monopole sur des maillons de la chaîne d’approvisionnement en semi-conducteurs. À noter que nous mettons l’accent sur le cœur de l’Europe et évitons les actions britanniques et suisses pour le moment.
  • Relevant le Japon de neutre à surpondérer – les données macroéconomiques se révèlent meilleures que prévu et les réformes de la gouvernance d’entreprise favorisent la création de valeur actionnariale et l’amélioration du rendement sur fonds propres.

Pour financer ces achats, nous avons réduit l’exposition aux marchés du crédit, augmentant ainsi la duration globale du portefeuille à risque élevé.

S’agissant des portefeuilles à risque faible et moyen, leur exposition aux actions (globalement neutre) nous semble adéquate. La pondération plus faible des actions y est compensée par une surpondération des obligations d’entreprises européennes investment grade et des obligations américaines à haut rendement.

Préférences sectorielles

Nous avons également profité de notre réunion de mars pour remanier nos préférences sectorielles afin de refléter les évolutions en cours.

L’immobilier a été relevé de neutre à positif car la baisse des taux d’intérêt devrait permettre à ce secteur de respirer. À noter que nous évitons l’immobilier commercial et mettons l’accent sur la logistique et l’immobilier résidentiel.

Les valeurs européennes de la consommation discrétionnaire ont également été relevées de neutre à positif, ce secteur bénéficiant d’un retour en grâce des valeurs du luxe et de l’automobile. En outre, la décrue de l’inflation et l’épargne excédentaire non dépensée devraient favoriser un rebond de la consommation en Europe tout au long du second semestre 2024.

Dans le même temps, le secteur de la consommation de base a été ramené à neutre. Aux États-Unis, un écart entre l’économie prospère et les ménages à faibles revenus est évident. Les entreprises qui s’adressent à ces derniers sont à la peine. De plus, le marché risque de surestimer l’impact des médicaments amaigrissants sur la consommation de produits alimentaires et de snacks. Même en cas de regain d’aversion au risque, ce secteur défensif pourrait ainsi ne pas résister aussi bien que par le passé, ses bénéfices étant menacés par le modeste rebond des volumes et par la restriction perçue de la consommation de nourriture et d’alcool.

Le secteur des matériaux a été relevé de négatif à neutre. Nous apprécions particulièrement le segment des matériaux de construction car les producteurs parviennent à augmenter leurs prix tandis que leurs coûts de production sont en train de diminuer : en effet, les prix de l’énergie (électricité, gaz naturel et charbon), de l’acier et d’autres intrants sont tous en baisse par rapport aux niveaux observés en 2023. Les volumes pourraient rester stables au cours des prochains mois, mais les baisses de taux d’intérêt devraient relancer les permis de construire et les mises en chantier, contribuant ainsi à stimuler les ventes. En revanche, les valeurs minières restent sous pression en raison de la faiblesse persistante de l’immobilier en Chine. Les cours du minerai de fer sont proches de leur plus bas niveau depuis sept mois, ce qui a un impact négatif sur les compagnies minières.

Conclusion

Les cinéphiles ont peut-être remarquer que le BILBoard de ce mois-ci s’inspirait quelque peu de la superproduction hollywoodienne Dune : Deuxième Partie. Comme sur la planète Arrakis et ses sables mouvants, il existe encore des risques qui se cachent sous la surface, et comme les vers des sables dentelés du film, on ne sait jamais quand ils surgiront. Les perspectives macroéconomiques sont clémentes pour l’instant, mais un choc inattendu ne peut être exclu à mesure que les conditions financières se resserreront. L’immobilier commercial y semble d’ailleurs particulièrement vulnérable. Par ailleurs, le paysage géopolitique est instable. Toutefois, le risque le plus important réside peut-être dans l’humeur changeante des investisseurs.

Voilà pourquoi nous augmentons l’exposition uniquement pour les investisseurs affichant une tolérance au risque élevée. Notre surpondération des actions porte essentiellement sur les États-Unis, un marché où nos positions sont en bonne partie couvertes contre le risque de baisse au moyen d’options qui n’expirent qu’après la réunion du FOMC de juin.

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